Du corps à l'ouvrage
 

Du corps à l'ouvrage

 

DU CORPS A L’OUVRAGE
texte
: Ronan Chéneau
conception, mise en scène : Nicole Yanni

Avec Maude Buinoud, Céline Greleau, Didier Lagana, Laurent Provots

composition musicale et bande son : Lionel Ginoux
vidéo : Vincent Arnaud
scénographie : Claudine Bertomeu
lumières : Pierre Zach

avec la participation à l'image de :
Philippe Adrien, Hervé Rofritsch, Joel Laplane, Isabelle, Mr Loddo, Mme Paldacci, Mr Ganassi

Merci aux artisans qui nous ont répondu, aux classes Menuiserie du CFA de la Valentine, à Guy Falzon et Pierre Moulin, à Floriane Gaudin, à Fabrice (costumes), à Laurent (galerie des puces), à Kader, à Côté Lumière, à Aurélien de Fursac et Pauline (stagiaire du Lycée la Calade).

production : Cie Cela ne finira jamais
coproduction : Théâtre des Bernardines

 

 

La Compagnie Cela ne finira jamais est régulièrement soutenue par la Ville de Marseille, le Conseil Général des Bouches-du-Rhône, le Conseil Régional PACA.
Avec le soutien du Ministère de la Culture [DMDTS] pour l’écriture du texte du projet.

Enjeux du PROJET


1. Les artisans sont porteurs d’un savoir faire, véritable trésor de notre humanité, ils nous permettent de comprendre à leur manière notre passé, ils semblent encore rester en dehors de la mondialisation. Dans chaque pays ils représentent des valeurs, un rapport à l’œuvre plutôt qu’au travail comme le dirait Hannah Arendt. Ils sont au service de la population mais depuis quelque temps ils disparaissent de notre secteur géographique et abandonnent leur ateliers aux amateurs de lofts.



2. En même temps, être très ancrés dans le passé peut amener à camper sur des positions de repli, de peur, caractéristiques de ce que certains peuvent appeler la « vieille Europe » : immobilisme, peur du changement, manque d’ouverture sur tout ce qui est perçu comme étranger.

3. D’autre part, m’interrogeant sur « le peuple des créateurs », comme le disait Peter Handke dans son poème dramatique « Par les villages », chercher à savoir quelles sont les valeurs qui les caractérisent dans l’imaginaire collectif :
Les notions du travail bien fait qui donnent la dignité à l’homme, la culture du dépassement de soi, la recherche du beau qui serait équivalent au bon, au bien, l’honnêteté, la sacralité de l’objet .
L’envie d’aller voir de plus près, de rencontrer ces artisans, de savoir aussi en quoi sont ils différents des artistes, savoir également quel est leur rapport à l’art.

 
 

photos : Claudine Bertomeu

4. Face à ça : le « nouveau monde  »
le savoir technologique, l’utilisation de nouvelles matières, la consommation de nouveaux produits, la société jetable, le changement perpétuel, l’accumulation de biens. En quoi cela modifie t-il le travail des artisans ?

Nous vivons depuis plusieurs décennies dans un monde dominé par le régime de la séparation. Chacun s’y soumet sans en prendre vraiment conscience, la connaissance de tous les domaines qui peuvent intéresser les hommes se manifeste à plat, sans lien, sans connexion en profondeur les uns avec les autres

Nous souffrons dans l’art également d’absence de perspectives, nous nous isolons de plus en plus et l’artisan semble être le sujet métonymique de cela, lui qui travaille seul dans son atelier 10 h par jour : chacun son pré carré, comme il y a pour chaque chose sa petite case.

 
Alors est née l’envie de faire un spectacle autour de ça

J’ai donc passé une commande d’écriture à Ronan Cheneau jeune auteur dramatique (Fées, Res Personna, édités par les Solitaires Intempestifs), avec lequel j’étais en relation depuis un an car j’aime son écriture qui parle des jeunes gens de 30 ans et de leur rapport au monde.

Etapes de réalisation


décembre 2007
l’exposition-installation

Contenu : Elle comportera, outre les vidéos des interviews avec son texte brut, un début de transformation poétique de la langue réalisée par l’équipe artistique.


avril-mai 2008
l’exposition-installation

Contenu : Des interventions artistiques in situ seront réalisées à partir des matériaux collectés lors des entretiens que nous réalisons avec plusieurs dizaines d’artisans (enregistrement de leurs paroles, de leurs gestes, de leurs ateliers). Plutôt que de les présenter dans un lieu unique, ces matériaux seront mis en scène pendant une semaine dans les ateliers et les boutiques des artisans qui nous ont reçus, faisant ainsi de ces lieux un décor en lui-même, ouvert à d’autres publics (les clients, les habitants du quartier, les passants, …) et permettant aux artisans de se rendre compte de notre chemin de transformation artistique.
- Images projetées sur dazibao ou images numériques
- Textes diffusés par hauts parleurs, etc.
Cette étape est conçue non seulement comme un geste artistique pour inaugurer le projet, mais aussi comme un moyen de toucher un nouveau public.


Ronan Chéneau
Comment commencer ?
Par l’essentiel peut-être… On pourra penser dans un premier temps que ce que j’écris n’est pas vraiment du théâtre… Je me repose très rarement en effet sur une narration, une fiction, des personnages. Je travaille en général sur commande, au plus près de l’acteur, jamais a priori, mais toujours pour du vivant, du présent. J’aime considérer le texte comme un élément parmi d’autres de la machine théâtrale, comme le son et la lumière, comme un matériau brut qui se construit au cœur du plateau. Pour ces raisons sans doute, ce que j’écris a souvent forme de prises de paroles, directes, parfois autobiographiques… la grande nouveauté ici, avec Nicole Yanni, est de pouvoir me confronter cette fois à des paroles extraites au cœur du « réel », paroles glanées, captées, issues d’une réalité qui peut difficilement mentir, celle du travail… L’écart, la différence extrême qui sépare des artisans français et de jeunes travailleurs japonais et chinois jouera comme un garde fou essentiel, pour justement ne pas se limiter a des questions de terroirs, ou de folklores, mais il s’agira au contraire, pour moi, de tenter de recoller les pièces d’une mémoire, d’une condition et d’une histoire collectives intenables, impossibles, « universelles » et donc inconcevables aujourd’hui… Ce sera ici que l’imaginaire, l’épreuve du plateau devront jouer, et aussi la liberté avec laquelle j’entends remodeler, travailler un matériau si singulier et si « vrai ».